Le choix d’une vie très longue en bonne santé : pourquoi ?
Pourquoi une durée de vie considérablement augmentée pourrait signifier une amélioration de l’humanité, au sens physique comme au sens moral ?
Publié le 18 décembre 2013, par dans « Immortalité ? »
Pourquoi une durée de vie considérablement augmentée pourrait signifier une amélioration de l’humanité, au sens physique comme au sens moral ?
Au mois de juillet dernier, en conclusion d’un article intitulé « Le choix d’une vie très longue en bonne santé : pour qui ? », je terminais par cette demi-promesse : « J’essaierai d’y revenir à l’occasion d’un autre article, mais il est évident pour moi qu’elles [les technologies de l’extension radicale de la durée de vie] portent les promesses d’une véritable amélioration de l’humanité, ici au sens de la collectivité des humains comme au sens moral ? »
Après le Longevity Day, qui le 1er octobre dernier, correspondait à la journée internationale de l’ONU pour les personnes âgées, et le 1er novembre où, pour la “fête des morts”, Radio France International interviewait plusieurs membres de Technoprog!, j’en profite pour revenir sur cette idée.
D’abord, je dois rappeler que cette interrogation fait partie de celles que se pose depuis longtemps mon ami et vice-président de Technoprog! Didier Coeurnelle et qu’il a proposé plusieurs pistes de réflexion à ce sujet dans son livre Et si on arrêtait de vieillir !
Avant d’envisager quelques réflexions personnelles, il me semble indispensable de les rappeler. Pour résumer succinctement, il distingue les avantages individuels des avantages collectifs. J’ai regroupé les seconds en quelques catégories.
Parmi les avantages individuels, je relève dans l’ordre:
– D’abord la possibilité de retarder, puis d’éviter la dégradation du corps et donc tous les affres qui lui sont liés (souffrances physiques et morales, dépendance, démence, etc.).
– Conserver à l’inverse un corps et un cerveau en bonne santé.
– Permettre que la « mort choisie » devienne plus répandue.
– Pouvoir au contraire choisir de continuer indéfiniment à repousser ses propres limites.
– Vivre plus longtemps, ce qui est en soi un avantage pour qui aime un tant soi peu la vie, et qui permettrait de poursuivre et diversifier encore ses activités économiques, sociales, culturelles …
À quoi je rajoute :
– Se libérer des religions en tant que théories proposant des réponses à l’angoisse existentielle. Cet « avantage » n’est pas directement argumenté mais il apparaît en creux de sa réflexion.
Parmi les avantages collectifs maintenant :
Arguments sociologiques
– Sauver des vies, des années de vie.
– Maîtriser la surpopulation : les populations à forte durée de vie ont une faible fécondité.
– Réduire la violence de la société : les personnes d’un âge plus avancé et avec une bonne expérience de la vie sont moins violentes.
- La perspective d’une vie beaucoup plus longue en bonne santé rend plus difficile le choix de mettre la sienne ou celle des autres en danger.
– Mieux préserver la mémoire vécue des individus.
- « un vieux qui meurt, c’est une bibliothèque qui brûle ».
– Rendre le monde plus stable.
– Développer une société plus harmonieuse.
Arguments économiques
– Réduire les dépenses de santé liées à la vieillesse (les plus onéreuses étant celles des dernières années de vie, notamment de la dernière).
– Faire des économies : les maladies liées à la dégénérescence provoquant la vieillesse coûtent très cher. La prévention coûte beaucoup moins cher que la guérison.
– Dégager du temps, des ressources et de la volonté pour lutter contre les autres causes de mortalité.
– Transformer progressivement le système de retraite en systèmes de retraites ! (Coeurnelle, p. 182) Chaque travailleur pouvant alterner tout le long de sa vie des périodes d’emploi et des périodes de formation ou des périodes sabbatiques.
– Accroître l’équité en permettant aux plus défavorisés de partir plus tôt à la retraite et en imposant des cotisations plus importantes aux plus favorisés.
– Établir plus d’égalité devant les conditions de vie.
- La mort frappe plus tôt les plus défavorisés économiquement. « L’immortalité biologique » pour tous serait une conquête de justice sociale. [note : on appelle « immortalité biologique » le fait de ne plus mourir de vieillesse ou des maladies qui ne sont pas foudroyantes. Cela ne supprime pas la mort accidentelle ou volontaire.]
– Mieux respecter notre environnement.
- La perspective d’une vie bien plus longue devrait rendre plus sensible à la préservation des conditions à venir de cette longue vie.
Arguments concernant l’humanité à long terme
– Profiter de la sagesse acquise.
– Rendre un jour envisageable des voyages au très long cours par une même génération de membres d’équipage, comme certains voyages spatiaux …
– Rendre l’humain sans cesse plus résilient et davantage capable de perdurer.
Et puis il y a cet argument qui recouvre sans doute tous les autres : Pourquoi faire le choix d’une vie très longue en bonne santé ?
– Parce que cela rendrait la vie plus précieuse encore.
À partir de cette (re)lecture de Didier Coeurnelle à laquelle j’invite tout le monde, je me propose maintenant de préciser certains arguments voire d’ouvrir quelques autres pistes. J’aborde successivement, en approfondissant plus ou moins dans les détails :
Des effets psychologiques
– L’effet que pourrait avoir la perspective d’une vie indéfiniment longue sur les populations les moins avantagées socialement.
– Quelques effets possibles sur notre psychologie (Ouverture ou fermeture ?).
– Les effets en termes de savoirs, d’expériences, de sagesse, de paix
Des effets démographiques
– L’effet en terme … d’espérance de vie !
– Les effets en terme de démographie et de dynamisme social.
Des effets économiques
– Certains effets possibles sur l’économie, notamment dans le rapport entre activité marchande et non marchande.
Marc Roux
(à suivre …)
2ème partie : Effets possibles sur notre psychologie d’une vie très longue
3ème partie : Effets possibles en terme de démographie d’une vie très longue
4ème partie : Effets économiques possibles d’une vie très longue