"Et si on arrêtait de vieillir !", de Didier Coeurnelle
Ce livre explique comment et pourquoi nous pourrions vivre beaucoup plus longtemps en bonne santé. Il ne s'agit pas de passer 50 années supplémentaires dans un lit d'hôpital, mais de repousser le moment à partir duquel notre corps et notre cerveau commencent à se dégrader.
Publié le 27 août 2015, par dans « Immortalité ? »
Ce livre explique comment et pourquoi nous pourrions vivre beaucoup plus longtemps en bonne santé. Le choix des termes est ici important, car les gens objectent souvent (et à juste titre) qu’il ne souhaitent pas vivre 50 années supplémentaires s’il faut les passer dans un lit d’hôpital. Au contraire, il s’agit précisément de repousser le moment à partir duquel notre corps et notre cerveau commencent à se dégrader (cancers, infarctus, Alzheimer…). Autrement dit, il s’agit de ralentir le vieillissement et de rester jeune (ou du moins en bonne santé) le plus longtemps possible. Et, pourquoi pas, indéfiniment – même s’il reste bien sûr possible de mourir accidentellement, ou de façon choisie.
Nous avons tendance à voir le vieillissement comme une usure « naturelle » de notre corps, de la même façon qu’un vélo s’use. Or, des recherches récentes semblent montrer que nous sommes « programmés » pour nous dégrader à partir d’un certain âge [1], sans que cela corresponde à une nécessité biologique intrinsèque. Ainsi, quelques rares animaux sont « amortels », c’est-à-dire : ils ne vieillissent pas, et leurs cellules peuvent se régénérer indéfiniment (à l’instar de la méduse ci-dessus [2]). Par ailleurs, nous ne mourons pas simplement « de vieillesse », mais de maladies engendrées par le vieillissement [3] : cancers, crises cardiaques, maladies neuro-dégénératives… Ainsi, lutter contre le vieillissement s’inscrit parfaitement dans le paradigme classique de la médecine, car cela revient à lutter contre ces maladies, ou à retarder voire empêcher leur apparition. Il en va de même pour des mécanismes tels que l’inflammation et l’accumulation de radicaux libres [4], dont le mécanisme n’a rien d’inexorable et pourrait un jour être inversé.
Alors, comment ralentir le vieillissement ? De nos jours, il n’y a pas de remède miracle, outre les conseils de bon sens : manger de façon saine, diversifiée et mesurée, pratiquer une activité physique modérée, bien dormir, etc. L’industrie pharmaceutique est prompte à nous vendre des produits révolutionnaires tels que la DHEA, mais leur efficacité supposée n’a jamais été testée à grande échelle. Nous dépensons par ailleurs plus d’argent pour masquer les effets de l’âge (produits anti-rides, etc) que nous n’en investissons dans la recherche contre le vieillissement ! Il y a pourtant des pistes sérieuses, telles que la régénération d’organes à base de cellules souches, ou la détection précoce de cancers grâce aux nouvelles technologies. Avec les progrès continus de la science, nous gagnons en moyenne trois mois d’espérance de vie chaque année [5].
Cependant, en matière de médecine, nous préférons guérir que prévenir. Ainsi, nous développons des techniques très sophistiquées pour soigner des cancers avancés, mais nous consacrons beaucoup moins d’argent à leur détection et à leur élimination préventive. Nous avons tendance à agir dans l’urgence, alors que sur le long terme, lutter contre le vieillissement en amont pourrait sauver bien plus de vies. Dans un futur (pas si) lointain, nous pourrions ainsi imaginer des nanorobots qui parcourant notre corps à la recherche de cellules cancéreuses à éliminer, ou la création d’organes et de tissus de rechange à partir de nos propres cellules souches.
Mais au fond, pourquoi vivre plus longtemps ? Beaucoup estiment que mourir fait partie de la nature humaine, et même davantage. Comme si, plus qu’un processus biologique, il s’agissait d’un rituel important pour chacun. Cependant, il faut prendre du recul par rapport à cela : ne pouvant éviter la mort, au fil des siècles, nous avons appris à l’aimer. Or, si nous endurions chaque matin cinq minutes de souffrance pure, de même, nous imaginerions des discours philosophiques pour rationaliser cette souffrance, en nous persuadant que c’est un aspect important de ce qui fait notre humanité. De tels discours sont une consolation charitable tant que la mort est inévitable. Mais de nos jours, ils deviennent un frein à la recherche contre le vieillissement.
A ceux qui craignent la surpopulation, on pourra objecter que dans presque tous les pays, il y a une corrélation entre allongement de l’espérance de vie et baisse de la natalité [6] : moins nous vivons dans l’angoisse de la mort, et moins nous ressentons le besoin de faire un grand nombre d’enfants. A ceux qui craignent l’ennui, on pourra objecter qu’à une certaine époque, les gens vivaient en moyenne 30 ans de moins qu’aujourd’hui. Pour autant, nous ennuyons-nous davantage dans nos 30 dernières années ? Au contraire, on assiste à un « boom » d’activité chez les seniors, et à une réorganisation des structures sociales. De même, les systèmes de pension de retraite se sont adaptés à cet allongement de la durée de vie. Pour bien percevoir le ridicule de certains discours contre la longévité, il faut imaginer ce que nos ancêtres (qui vivaient 50 ans) auraient objecté contre une espérance de vie de 80 ans (qui est aujourd’hui une réalité) : leurs arguments nous sembleraient profondément limités et biaisés.
Pour finir, vivre plus longtemps pourrait nous rendre plus altruistes et plus impliqués dans le long terme. En effet, si la mort n’est plus une fatalité, elle devient d’autant plus inacceptable quand elle survient par accident ou par négligence. Par ailleurs, nos actions à long terme sur la société et sur l’environnement n’engagent plus que nos petits-enfants, mais bel et bien nous-mêmes. Par conditionnement, nous sommes prompts à dépeindre une telle société comme plus malheureuse et plus égoïste, voire à présenter la lutte contre le vieillissement comme une forme de « haine de soi ». Pourtant, ne faut-il pas beaucoup se haïr soi-même pour souhaiter sa propre suppression (la mort) lorsque nous avons la possibilité de l’éviter ?
Ainsi, la lutte contre le vieillissement devrait être un enjeu collectif, et non plus le privilège de quelques milliardaires, ou de sociétés privées promptes à « breveter le vivant » (et donc à bloquer l’accès de ces technologies au plus grand nombre). Il faut donc que ces recherches deviennent un enjeu de santé publique, et que leurs résultats soient massivement diffusés et accessibles à tous.
— Alexandre
[alexandre point technoprog arobase gmail point com]
A propos de l’auteur
Didier Coeurnelle est co-président de Heales (Healthy Life Extension Society) [7], une association qui milite pour l’allongement de la durée de vie en bonne santé. Il est également vice-président de l’Association Française Transhumaniste, et militant écologiste.
Références
Le livre : http://www.amazon.fr/Et-arr%C3%AAtait-vieillir-perspectives-beaucoup/dp/2916571809
[1] http://passeurdesciences.blog.lemonde.fr/2015/06/23/vieillir-est-il-une-maladie/
[2] http://www.20minutes.fr/sciences/1052308-20121129-meduse-detient-elle-cle-immortalite
[3] http://www.neuromedia.ca/les-maladies-liees-au-vieillissement/
[4] http://www.lanutrition.fr/bien-dans-son-age/vieillissement/comprendre-le-vieillissement/comment-les-radicaux-libres-nous-font-vieillir.html
[5] http://www.20minutes.fr/sante/1469779-20141028-bientot-pilule-contre-vieillissement
[6] Conférence très intéressante et pédagogique sur la stabilisation du taux de natalité : https://www.youtube.com/watch?v=eA5BM7CE5-8 (ne pas s’arrêter au titre, qui est assez mal choisi)
[7] http://www.heales.org/nhs/index.php/french/presentation