La gestation pour autrui – Etats Généraux de la Bioéthique

L'Association Française Transhumaniste : Technoprog refuse les argumentations qui prennent prétexte du terme éthique pour réintroduire la domination de la morale dans des champs qui ressortent des choix et des libertés personnelles.

Publié le 9 juin 2009, par dans « Question socialeRisquestranshumanisme »

L’opportunité d’utiliser la GPA concerne les individus. Très sujet aux jugements moraux ce domaine doit être abordé en ayant conscience de ce travers afin d’éviter une loi reposant sur des à priori moraux majoritaires (en nombre ou en influence) et donc liberticides.

Trois points sont importants ici: le rapport au corps, le rapport à l’enfantement et enfin l’enfant. Ce débat illustre également le risque de déviance de la bioéthique.

Le rapport au corps

Cette question concerne la mère porteuse. Elle peut s’énoncer comme suit : Puis-je rendre des prestations avec mon corps ? Rémunérées ou non ? Cette question est très intime, très personnelle. Il y a de nombreuses argumentations pour et contre qui dépendent essentiellement de nos valeurs, expériences et éducations. Il n’y a donc pas de « vérité » absolue sur ce domaine.

Notre association considère que toute interdiction, qu’elle se justifie par la « protection », la « morale », ou le « refus de la marchandisation », n’aurait comme unique effet et traduction concrète que de faire passer le pouvoir de décision de l’usage du corps de chacun, des individus eux-mêmes à la loi.

La question de l’autorisation des mères porteuses sous son aspect « rapport au corps » se pose donc comme suit : A qui appartient le pouvoir de décision sur le corps des individus ?

Le rapport à l’enfantement

Cette question concerne les parents désirant l’enfant ainsi que la mère porteuse. Il s’agit du mode de conception de l’enfant. De quelle façon doit il être conçu, et comment doit se passer son développement. Créer un enfant en utilisant une chemin différent de la voie « traditionnelle » est il acceptable ?

Notre association considère que le mode d’enfantement ne concerne que les parents et uniquement les parents. C’est aux parents qu’il revient de décider de leur rapport à l’enfantement. C’est un sujet qui a trait aux valeurs personnelles.

Ainsi une interdiction de la GPA pour des couples non stériles reviendrait à considérer que le seul mode d’enfantement valable est la voie traditionnelle. Cela fixerait donc dans la loi un point qui n’est pas sensé concerner la société, un point qui a trait aux valeurs personnelles. Cela reviendrait à appliquer à l’ensemble de la société le système de valeur dominant (en nombre ou en influence) pour un sujet strictement personnel.

L’enfant

C’est le débat le plus compliqué car passionnel (on ne touche pas aux enfants !), dans le lequel on a toujours eu tendance à projeter comme argument irréfutable des conceptions « du moment ». Ainsi en a-t-il été lors du débat sur la contraception ou certains considéraient que pouvoir décider ou non d’avoir un enfant ferait porter sur ce dernier un poids psychologique lié au « désir d’enfant » trop important.

La « Vérité » assenée, selon laquelle le bien être de l’enfant est lié au fait d’être porté par sa mère biologique est une traduction de la conception « actuellement traditionnelle » de la mise au monde, une perception actuelle considérée comme une vérité immuable sur l’enfantement et les relations parents-enfants.

Va-t-on (encore) essayer de nous faire croire que les rapports humains sont définis « ad vitam æternam » ?

Notre association considère que la GPA procède de la même logique que la contraception et l’avortement, celle de la maîtrise de son propre corps. Les enfants qui naîtront par la GPA seront des enfants tout à fait « normaux », et désirés.

Le risque de déviance de la bioéthique

Ce débat met en évidence la déviance de la bioéthique en une généralisation liberticide de la morale majoritaire du moment. Un pas en arrière pour nos démocraties libérales dans lesquelles, après de nombreuses luttes, la maîtrise de son propre corps et le refus de réguler des parties strictement personnelles de la vie des individus ont été acquises.

Là ou l’interdiction impose une norme de comportement, la liberté permet le choix. La liberté permet à chacun d’agir selon ses choix personnels, là ou l’interdiction condamne les minoritaires à agir selon la morale des majoritaires.

Notre association considère donc que la loi de révision de bioéthique ne devrait pas avoir comme finalité de décider si la GPA est autorisée et quelles sont les conditions pour y recourir. Cette loi devrait avoir pour objet d’encadrer les conditions d’utilisation (santé…) et les aides possibles.

Tout le monde devrait pouvoir avoir recours à la GPA, même les couples fertiles. Il n’appartient pas à l’Etat d’indiquer quel rapport au corps est le bon, ni d’indiquer quel mode de conception est acceptable et encore moins quelles sont les relations humaines qu’il faut avoir.

Il faut permettre la GPA car…

  • C’est un pas de plus dans la maîtrise de son propre corps par chaque individu. Afin de permettre à chacun de vivre en fonction de ses valeurs personnelles. Grâce à la magie de la liberté, les individus pourront agir comme bon leur semble ; rendez vous compte, ceux ne désirant pas recourir à la GPA pourront ne pas le faire !
  • Une régulation découlant d’une prise en compte franche des réels tenants et aboutissants de la GPA permet aux individus d’agir dans des conditions de sécurité optimale pour tout le monde (enfants compris).
  • Cette liberté permet plus d’égalité en évitant de devoir partir dans un autre pays, et ce faisant, réservant la GPA aux individus disposant de moyens financiers suffisants (importants de fait…)
  • Cela laissera à la société civile le soin d’édicter ses propres normes aux niveaux de la parentalité, de l’enfantement et du rapport au corps. Normes qui pourront évoluer en fonction de cette dernière.
  • Et enfin, ce sera une preuve envers nous même de notre capacité à réfréner nos pulsions de contrôle du comportement des individus. Franchement, désirez vous contrôler le corps, la reproduction et les relations parents-enfant de l’Autre ?

Auteur :

Stéphane