La mort de la mort. Lettre de juin 2015. Numéro 75.

Rien n'a été découvert en biologie qui indique l'inéluctabilité de la mort. Cela suggère pour moi qu'elle n'est pas du tout inévitable et que c'est seulement une question de temps avant que les biologistes découvrent ce qu'est la cause du problème et que cette maladie universelle et terrible ou cette "temporarité" du corps humain sera guérie.

Publié le 30 juin 2015, par dans « transhumanisme »

metformin(…) Rien n’a été découvert en biologie qui indique l’inéluctabilité de la mort. Cela suggère pour moi qu’elle n’est pas du tout inévitable et que c’est seulement une question de temps avant que les biologistes découvrent ce qu’est la cause du problème et que cette maladie universelle et terrible ou cette « temporarité » du corps humain sera guérie. Richard Phillips Feynman Prix Nobel de physique de 1965 (1918-1988) (traduction)


Thème du mois: À la recherche de termes adéquats pour désigner les personnes pour et contre une longévité accrue


L’immense majorité des citoyens souhaite une vie en bonne santé la plus longue possible,

Cependant, l’immense majorité des citoyens passe peu de temps à s’interroger ou à agir sur les moyens de vivre nettement plus longtemps, que ce soit en prenant des mesures pour sa santé ou en se mobilisant pour la recherche.

Dans ce domaine comme dans d’autres, une mort, c’est un drame, mille morts c’est une statistique. Qu’une personne que nous connaissons meurt de vieillesse, cela nous émeut, que 110.000 personnes meurent de maladies liées au vieillissement chaque jour, c’est la banalité du quotidien.

Aujourd’hui, malgré les progrès médicaux, aucun terme courant ne désigne ceux qui militent pour des progrès médicaux et scientifiques permettant une vie en bonne santé beaucoup plus longue. Il n’y a pas non plus de terme pour définir ceux qui s’y opposent, à savoir les philosophes et éthiciens qui considèrent que la durée de vie actuelle est globalement satisfaisante. Les lignes suivantes envisageront quelques hypothèses

Termes utilisés pour désigner les personnes qui veulent permettre une vie en bonne santé beaucoup plus longue à ceux qui le souhaitent

Les immortalistes.

Le terme est provocateur et commode. Que cherchent à éviter, presqu’en toute circonstance, l’être humain et aussi l’animal? C’est la mort, de quelque source qu’elle soit. Cependant, le mot immortalité désigne l’invincibilité, l’impossibilité de mourir. Ce n’est ni possible ni souhaitable. Ce n’est pas possible parce que, dans un futur prévisible, nous resterons susceptibles de mourir que ce soit de maladies non encore connues, d’accidents, de suites d’une catastrophe ou pour une autre raison. Ce n’est pas souhaitable parce que vivre est un droit, pas une obligation. Un monde dans lequel il ne serait pas possible de mourir pourrait être totalement insoutenable pour certains.

Enfin, le terme a une signification religieuse forte. C’est la promesse d’une éternité après le décès qui concerne de nombreux courants religieux à commencer par les chrétiens et les musulmans.

Pour s’en distinguer, des spécialistes parlent « d’immortalité biologique ». Ce terme est déjà utilisé pour définir la situation des (très rares) êtres vivants qui ne se dégradent pas irrémédiablement suite à leur avancée en âge. Il exprime aussi l’objectif de certaines personnes: la fin de sénescence humaine. .

Amortalistes

Le terme amortalité est un néologisme encore assez peu utilisé. Il pourrait désigner les êtres vivants d’aujourd’hui et les femmes et les hommes d’après-demain pouvant vivre sans vieillissement et donc sans limitation de durée mais pour qui subsiste un risque de mortalité par accident, décès volontaire, violence,…. Aujourd’hui cette amortalité signifierait la fin d’environ 70 % des décès dans le monde et de près de 90 % de la mortalité dans l’Union européenne. Bref, nous ne mourrions plus de vieillesse, mais nous courrions encore le risque d’être écrasés par un véhicule, par exemple. « Mourir oui, mais plus de mort lente » pour paraphraser et contredire Georges Brassens.

Longévitistes ou prolongévitistes

Le terme longévité désigne bien la perspective de l’écoulement du temps sans la dégradation qui y est aujourd’hui liée. L’ajout du préfixe « pro » rend l’objectif encore plus compréhensible. Les citoyens concernés pourraient se définir comme membres d’un mouvement longévitiste ou prolongévitiste.

Enfin, d’autres termes sont parfois proposés, mais ils ne sont pas souvent utilisés: anti-âge (surtout utilisés pour des produits), antivieillissement, « mélioriste » (pour améliorer l’homme) et « augmenteur »  (du terme « augmentation », proche de l’anglais « enhancement »).

Dans la suite de cette lettre, c’est le mot « longévitiste » qui sera utilisé.

Termes utilisés pour les personnes qui refusent une vie en bonne santé beaucoup plus longue (pour eux-mêmes voire même pour ceux qui le souhaitent)

Il n’y a pas de terme par lequel les opposants à la longévité en bonne santé accrue se définissent systématiquement. Cependant, certains termes sont utilisés, principalement par les longévitistes.

Mortalistes

Les longévitistes anglo-saxons utilisent parfois un terme peu amène pour désigner leurs détracteurs: « deathist » que l’on pourrait traduire par « mortaliste ». Le terme peut a priori paraitre excessif.

Il y a en effet parmi les opposants, certains qui estiment d’abord que lutter contre les maladies liées au vieillissement est impossible et donc « utopique » au sens commun du terme. Ils estiment que l’objectif est inatteignable. Dans ce cadre, les opposants ne sont pas « mortalistes » mais suivent simplement leur perception de ce qui est possible.

Mais d’autres opposants aux progrès médicaux (ou parfois les mêmes) se prononcent clairement contre le développement de solutions pour vivre plus longtemps, même si cela devient médicalement possible. Ils considèrent par exemple que la vie ne vaut pas la peine d’être vécue au-delà d’un certain âge ou ils estiment qu’il y a une sorte de « devoir de mourir » par  « solidarité avec les jeunes ».

Autres termes

Les anglophones utilisent assez souvent le terme « ageism » qui est traduit en français par « âgisme ». Il désigne les discriminations à l’égard des personnes âgées dont le souhait de ne pas allonger la vie « inutilement » ou « de manière contre-nature » peut faire partie. Le terme bioconservateur est aussi parfois utilisé ainsi que le mot « apologiste » (pour désigner ceux qui font l’apologie du monde tel qu’il est, un monde où la durée de vie « naturelle » ne doit pas être augmentée).

L’avenir nous dira si un terme sera intégré au vocabulaire français ou si l’évolution vers la longévité se fera sans trop de heurts. Après tout, il y a eu des opposants à toutes les grandes progressions technologiques, pour de bonnes et de mauvaises raisons, mais l’histoire n’a pas toujours gardé leurs noms. Ainsi il n’y a pas ou plus de terme pour désigner les opposants à l’hygiène médicale, à l’anesthésie et aux transfusions sanguines.


La bonne nouvelle du mois : Essai clinique d’un produit luttant contre le vieillissement envisagé avec les autorités fédérales aux États-Unis.


Une équipe de chercheurs dont le professeur Nir Barzilai de l’Albert Einstein College of medecine de New-York et le gérontologue renommé Jay Olshansky a proposé à la « Food and Drug Administration » américaine (FDA) de tester durant 5 à 7 années l’utilisation de metformine pour trois mille patients âgés. L’expérience appelée « TAME Study » concernerait des personnes se trouvant  dans des groupes à risque ou souffrant de maladies liées à l’âge. L’objectif est de vérifier si ce produit a un impact positif pour réduire plusieurs maladies et diminuer les processus du vieillissement dans leur ensemble.

La presse anglo-saxonne et francophone ne s’y est pas trompé. Par exemple, Le Soir, quotidien belge francophone de référence, a titré « Vieillir, bientôt une maladie? ». La puissante autorité américaine n’a pas encore décidé. Quel que soit le résultat, l’impact est déjà positif dans l’opinion publique. De plus en plus, la vieillesse n’est plus seulement un naufrage (pour reprendre une phrase du général de Gaulle), c’est aussi une maladie dont on ne guérit pas encore mais qui se soigne.


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Vice-président de l’AFT-Technoprog Je me définis comme un activiste du social essayant de promouvoir l’égalité et la solidarité à tous les niveaux notamment grâce aux progrès technologiques utiles qui nous permettent de vivre mieux, plus longtemps et d’échanger de plus en plus de connaissances. En savoir plus