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Neuvième entretien avec l'un de nos membres, en l’occurrence le Président et cofondateur de l’AFT Marc Roux, pour découvrir la grande variété des transhumanistes francophones.
Publié le 21 mars 2023, par dans « transhumanisme »
– Peux-tu te présenter rapidement ?
Je suis historien (médiéviste !) de formation, ayant fait mes études doctorales en Grèce. J’ai été ensuite enseignant du secondaire pendant dix ans, notamment dans les banlieues parisiennes. Après quoi, avec ma famille, nous avons fait le choix de revenir nous installer en Grèce, il y a quinze ans. Ce choix m’ayant donné du temps, j’ai pu le mettre à profit pour m’investir fortement dans ce qui m’a paru alors le plus important, développer et diffuser la pensée transhumaniste en langue française. C’est ainsi que je suis devenu président de l’AFT-Technoprog.
– Comment as-tu connu le transhumanisme, ou les thèmes principaux du transhumanisme ?
En revenant en Grèce, en 2007, je me suis jeté dans tout un tas de lectures, dont plusieurs essais de socio-politique. C’est au détour de l’un d’eux que je suis tombé sur le mot “transhumaniste”. J’ai déroulé la pelote et j’ai découvert les premiers forums et les premiers livres qui avaient été alors écrits en français (notamment celui de Rémi Sussan, Les utopies posthumaines). Après quoi j’ai commencé à lire les transhumanistes anglo-saxons. Mais, ce faisant, je découvrais aussi que ces idées étaient en grande partie celles auxquelles je réfléchissais tout seul dans mon coin depuis des années. Avec le transhumanisme, je trouvais une cohérence, ainsi qu’une direction dans laquelle m’investir.
– Quel a été le déclic pour adhérer à l’AFT-Technoprog ?
C’est fin 2008 que j’ai repéré la première liste de diffusion technoprogressiste française. Une dizaine de personnes y discutaient. Ils avaient aussi mis en place un site et un blog. Se référant notamment à la pensée de James Hughes, je me suis tout de suite reconnu dans leur approche. J’ai alors commencé à proposer des articles pour le blog, puis nous avons lancé un premier forum. Mais rapidement, il m’est apparu que nous aurions intérêt à faire de ce groupe une association de type loi 1901. Comme j’avais déjà une assez longue expérience de la vie associative, j’ai activement contribué à la fondation de l’Association Française Transhumaniste.
– Comment vois-tu l’avenir à court terme (10 prochaines années), moyen (50 prochaines années) et long termes (2100, 2200) ?
Bon, en général, je ne réponds pas de manière directe à ce genre de question, pour la bonne raison que « je ne vois pas l’avenir » ^^.
Je commence donc par signaler que, répondre à cette question, c’est en fait simplement parler de nos espérances ou de nos craintes au jour d’aujourd’hui, et faire des projections à partir de nos connaissances actuelles et de certaines logiques évolutives que nous sommes capables d’imaginer.
Cela dit,
– à court terme, j’imagine que les changements seront peu nombreux (la science, les technologies, mais plus encore les mentalités n’avancent pas aussi vite que ce qu’on croit). Mais j’espère qu’une première recherche sera menée jusqu’au bout des essais cliniques, qui nous permettra de commencer à contrôler le vieillissement. C’est le domaine le plus prometteur dans les perspectives transhumanistes.
– à moyen terme, j’espère d’une part que nous commencerons à maîtriser la fusion nucléaire et que celle-ci tiendra ses promesses d’une énergie sûre, abondante, bon marché et respectueuse de l’environnement. Mais j’espère aussi que les progrès des neurosciences auront été tels que nous commencerons à être en mesure de moduler nos émotions.
– À long terme, j’espère que, grâce aux progrès précédents, nous aurons surmonté les drames actuels : rétabli de bons équilibres écologiques, restitué une forte biodiversité, acquis une source d’énergie sûre et très abondante, accru considérablement notre durée de vie en bonne santé et en pleine jeunesse, et surtout atteint un degré supérieur d’amélioration mentale.
– Quel est le domaine qui te semble le plus important, ou qui t’intéresse le plus, dans le transhumanisme ?
Sans aucun doute, le domaine que j’estime être le plus important est celui que les anglo-saxons ont appelé moral enhancement, et que je propose de traduire par « amélioration mentale ». En effet, bénéficier d’une « amortalité » (absence de maladies et contrôle du vieillissement) serait extraordinaire, mais pouvoir vivre beaucoup plus longtemps sans être capable de vivre plus heureux, en meilleure harmonie avec les autres et la planète me paraît une quête assez vaine. Nous resterions toujours autant capable de nous annihiler nous même. Or, à mon avis, l’objectif majeur et à long terme du transhumanisme est de permettre que perdure indéfiniment une conscience d’origine humaine.
– Pour finir, quels sont tes centres d’intérêt hors transhumanisme ?
Les neurosciences, l’histoire et la politique. Ce sont trois domaines qui ne sont pas étrangers au transhumanisme mais le croisent. L’histoire donne le réflexe de tout penser à long terme ; la politique impose de penser comment les idées et les technologies peuvent être implémenter dans la société, elle implique la responsabilité ; les neurosciences représentent le domaine le plus prometteur pour une amélioration de l’humanité.
Sinon, je dois avouer que je passe une bonne partie de mon temps avec ma famille (Nous avons cinq enfants :-)).
– Quelle image choisirais-tu pour illustrer cette interview, et pourquoi ?
Difficile… Je choisis finalement l’image qui a servi de tout premier visuel pour identifier l’AFT-Technoprog. Il s’agit du bandeau d’illustration du premier site créé dès 2007 par l’un des tout premiers membres de l’AFT, avant sa déclaration officielle. C’est ce bandeau, avec son œil à l’iris déjà viridien, où viennent se fondre une feuille émeraude et un circuit intégré, qui a ensuite fourni l’inspiration pour la création du logo de l’association. Cet œil grand ouvert nous regarde en même temps qu’il regarde vers un infini au-delà de nous.
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