TransVision 2022 : synthèse des tables rondes
Synthèse des tables rondes pour souligner les convergences au sein du mouvement transhumaniste ; et conclusion générale de TransVision 2022.
Publié le 31 janvier 2023, par dans « Nos actions »
Convergences :
Table-ronde #1 :
“Diversités géographiques : le transhumanisme en Afrique”
L’islam n’est pas incompatible avec le transhumanisme.
Beaucoup d’entreprises hightech s’installent en Afrique, ce qui est excellent cependant beaucoup achètent des brevets, cela est contraire à la notion d’opensource, recommandée par l’AFT.
Table-ronde #2 :
“Diversités d’interprétations politiques”
La question c’est « comment s’assurer que le transhumanisme ne soit pas un facteur de régression ou de nouvelles inégalités ».
Les partis politiques courent après les innovations, sauf les écologistes qui regardent systématiquement en arrière. Le transhumanisme, s’il veut se développer doit à la fois faire du lobbying auprès des partis politiques existant et créer son propre parti, comme aux USA.
Les h+ pourraient s’inspirer des méthodes du Parti Pirate dans leurs pratiques politiques internes.
La prochaine échéance sont les élections européennes de 2024. Nous devons nous demander sans tarder comment s’y impliquer.
Les 3 intervenants partagent le constat que les sujets relatifs aux technologies disruptives sont mal appréhendés par les politiques, faute à des parcours plutôt orientés sur le droit et la gestion. La prise en compte de ces sujets se fera-t-elle dans les partis traditionnels, ou par l’arrivée de nouveaux partis à la culture radicalement différente ?
Table-ronde #3 :
“Singularité technologique et Intelligence Artificielle”
La Singularité technologique ne devrait pas intervenir avant 2045, tout particulièrement en France, pays technophobe, alors que la Chine, les USA sont technosolutionistes, tout particulièrement pour le climat… de plus faut il penser à une Singularité ou à de multiples micro singularités dans divers champs ?
Comment définir la Singularité technologique et estimer ses impacts ? Les deux intervenants divergent sur les prérequis technologiques et les modalités de cette transformation massive de nos sociétés, mais s’accordent sur le fait que la plupart des réponses à ces questions viendront des USA, bien moins technoconservateurs que la France.
Table-ronde #4 :
“Longévitisme : Immortalité ou Amortalité ?”
L’optimisme des années 2010 fait place à plus de circonspection, avec en particulier le recul de l’espérance de vie…malgré des dépenses de santé qui augmentent sans cesse. Peut être qu’en 2045 l’espérance de vie aura atteint 100 ans , limite liée aux capacités de l’hippocampe humain pour l’encodage des souvenirs et des apprentissages.
Table-ronde #6 :
“Futur de la procréation”
La plupart des transhumanistes sont favorables aux évolutions qui permettent d’élargir les possibilités de choix dans le domaine de la procréation. D’ailleurs, ils remarquent que bon nombre de pratiques déjà disponibles sont en fait plébiscitées par les sociétés (DPI, PMA, méthodes contraceptives, élimination des embryons porteurs de trisomie 21, etc.). Ils envisagent comme une chose potentiellement bonne aussi bien l’utérus artificiel que l’ingénierie génétique pré-natale. Par ailleurs, ils n’ont pas de problème avec les possibilités d’évolution trans-genre.
Néanmoins, certains transhumanistes estiment que l’ingénierie génétique ou les transitions de genre ne devraient être proposées qu’à des personnes adultes.
Table-ronde #7 :
“Mondes virtuels”
Le métavers, mot utilisé pour la première fois par Neal Stephenson dans son roman “Snow Crash” en 1992, désigne un outil qui permet de vivre une expérience différente de la réalité.
L’idée de métavers (monde virtuel / imaginaire) existe depuis la préhistoire avec les shamans et peintres rupestres qui utilisaient des psychotropes pour entrer dans leurs mondes virtuels, plus tard les artistes de la Renaissance ont aussi beaucoup travaillé sur le sujet des mondes virtuels dans leurs œuvres.
Enfin, la télévision (qui est une sorte de métavers) a permis que l’humanité puisse s’agglomérer dans les mégalopoles sans grand incident, le métavers est donc la prochaine étape, l’IA va d’ailleurs aider le développement de métavers complexes.
D’un point de vue transhumaniste technoprogressiste, le développement des métavers peut se révéler utile dans des domaines tels que l’éducation, l’art mais aussi dans la médecine comme dans le militaire.
Table-ronde #8 :
“Transhumanisme viridien / Géo-ingénierie”
Selon Thibaut Atché (qui n’est pas transhumaniste), le manifeste viridien est un texte intéressant et bien réalisé.
Il y a des transhumanistes qui sont également impliqués dans le militantisme écologique. En fait, c’est même une évidence car les transhumanistes se préoccupent tant des espoirs que des risques dans le futur.
Comme pour les questions de vie en bonne santé beaucoup plus longue, il est difficile de faire une priorité urgente à propos d’objectifs à long terme. Plus la vie est longue, en bonne santé et épanouie, plus nous sommes attentifs au futur et moins.
Table-ronde #9 :
“Vie sauvage / Vie animale”
Divergences autour de l’élevage paysan « tactique » Axelle pensant qu’il donne une piste de convivialité avec les animaux, tandis que Thomas envisage une abolition rapide et totale de toute forme d’élevage
Convergences fortes sur l’abolition de l’élevage industriel et l’élevage paysan donnant lieu à exploitation et mise à mort.
Convergences sur le fait de prendre les animaux non pas en tant qu’espèces mais en tant qu’individus ayant des intérêts individuels (ne pas souffrir). Dès lors le maintien à tout prix des espèces comme elles sont, ou la valorisation/sacralisation de la biodiversité est une erreur. Il faut voir à chaque fois quels sont les impacts d’un accroissement ou d’une diminution de la biodiversité sur la qualité de vie des individus toutes espèces confondues.
Le forçage génétique est envisageable, et la viande cellulaire pour ne pas brusquer les habitudes alimentaires.
Commencer par traiter les animaux comme voisins à aider, ou dans un rapport “gratuit”.
Table-ronde #10 :
“Améliorations mentales et intellectuelles”
La critique appelle à être attentifs aux risques d’être formatés par la machine. La parole et la symbolique jouent un rôle clé dans ce qui nous fait humain. Peut-on conserver la capacité à faire le bien si on supprime la capacité à faire le mal ?
Mais les humains ont toujours légitimement recherché des formes d’amélioration mentales. On rappelle que la technique contribue à la culture et aux arts. Elle propose de nouveaux symboles.
Ce qui est important est de conserver la capacité de choix. On doit pouvoir expérimenter avec son propre cerveau. Finalement, on peut « profiter des machines pour être un peu plus humains ».
Table-ronde #11 :
“Spiritualités” avec l’Université Catholique de Lille (chaire ETHICS)
Le transhumanisme a le potentiel d’assumer un bonne part de ce à quoi répondent les religions. Il arrive à une époque ou les religions antérieures sont sur le recul. Mais il a l’avantage d’être en plus efficace sur le réel et d’être optimiste. Par ailleurs, plutôt qu’une religion, ce qu’il peut proposer est une spiritualité, qui s’adresse davantage aux individus qu’aux communautés et qui intéressent davantage les plus jeunes générations.
Cela dit, si la religion semble correspondre à un besoin ou à un manque présent depuis toujours chez l’humain, le transhumanisme pourrait changer la donne si on parvenait à modifier la source neurologique du besoin religieux. Mais le manque peut également être vu non comme la source du désir de dépassement : vers l’autre et vers l’amélioration.
Table-ronde #12 :
“Liberté morphologique, jeux sur les formes (écologiques, sociétales, identitaires) : pourquoi la transe?”
Le fétichisme morphologique est une manière de pratiquer des valeurs et des conceptions (idéalisme, matérialisme ou dualisme) auxquelles en réalité on ne croit pas. On se rabat sur l’identité ou la dignité ou la liberté qu’on n’arrive pas à fonder, on fait comme si, on est dans la semblance, et alors ne reste plus que le fétiche morphologique entendu au sens large (corporel, social, communautaire, etc.) Les fondamentalismes, même transhumanistes, sont là lorsqu’il y a une direction univoque imposée : il n’y a plus alors de trans et de réversion possible. Or seul le trans peut être humaniste. La modernité comme coexistence des modes subjectifs.
Mais il peut aussi y avoir des résistances physiologiques qu’il est inutile de doubler du fétichisme idéologique.
Table-ronde #13 :
“Soldat augmenté »
La recherche pour les soldats augmentés est notamment une recherche pour la résilience. En ceci, ce sont aussi des objectifs d’améliorations pour tous qui peuvent être poursuivis.
Pour les responsables militaires français, l’attitude est celle d’une ouverture aux améliorations. Mais elles doivent être réversibles.
Un soldat « remplacé par une intelligence artificielle ne signifie pas nécessairement plus de souffrances causées. Par exemple, l’IA ne ressentira pas nécessairement le souhait de vengeance.
Table-ronde #14 :
“Science Fiction”
Convergences sur les interactions entre sciences et imaginaires : impact des romans de SF sur l’imagination des scientifiques, impact des sciences et technique sur les auteurs de SF.
Plusieurs définitions du transhumanisme : mystique positiviste ; courroie faisant passer le conditionnel de la SF en projet politique au futur de l’indicatif ; liberté morphologique et optimisme.
Convergences et divergences sur la qualité et la productivité de plusieurs œuvres de SF.
Table-ronde #15 :
“Geographic diversity”
Les nouvelles technologies sont les bienvenues en Afrique car elles sont une source de progrès et de développement pour une population jeune et tournée vers l’avenir. Le continent devrait globalement être moins rétif au transhumanisme que l’Europe.
Dans le monde arabo-musulman certaines interprétations religieuses peuvent rendre sourd au discours longévitiste. Mais un discours jouant sur certaines contradictions de l’Islam pourrait permettre à la pensée transhumaniste d’avancer.
Pour faciliter cette progression, l’éducation jouera un rôle clé.
Table-ronde #16 :
“Political diversity”
Plusieurs stratégies sont mises à l’épreuve par des transhumanistes et technoprogressistes du monde entier pour se faire entendre dans le débat politique global, alors même que le clivage gauche-droite évolue, y compris chez les transhumanistes. La crise sanitaire du Covid-19 a jeté une lumière crue sur un mouvement anti-science que peu avaient anticipé.
Table-ronde #17 :
“Wildlife / Animal life”
– Il faut que le transhumanisme ne s’occupe pas que de l’humain mais de l’ensemble des animaux sentients.
– Le transhumanisme et l’animalisme considèrent tous deux que l’état naturel n’est pas forcément l’état le plus optimal.
– Convergence sur le fait qu’il est de notre devoir de permettre aux individus humains et non-humains d’améliorer leur biologie pour réduire la souffrance et augmenter le bien-être.
– Divergence sur le fait qu’il faut ou non parler dès maintenant au grand public des sujets les plus controversés et créant le plus de réactance comme l’abolition de la prédation grâce à l’herborisation des carnivores. Certains disent que ça permet d’ouvrir la fenêtre d’Overtone, d’autres disent que ça va braquer les gens.
Table-ronde #18 :
“Longevitism”
En Allemagne, depuis plusieurs années, un parti longévitiste se présente aux élections.
En Afrique subsaharienne, des transhumanistes résolument positifs concernant les progrès technologiques et la longévité s’associent à travers le TAFFD (Transdisciplinary Agora For Future Discussion) et Afrolongevity|
Via la LEVF (Longevity Escape Velocity Foundation), Aubrey de Grey va expérimenter des nouvelles thérapies combinées sur un millier de souris âgées.
Table-ronde #19 :
“Cryonics”
Diversité des contextes législatifs : permissivité dans les pays anglo-saxons ; restrictions ou interdiction en Europe continentale => changer la législation.
Importance d’informer car les gens ne savent toujours pas ce qu’est la Cryonie.
Les progrès de la lutte contre le vieillissement ne sont pas assez rapides ; la cryonisation fonctionne => c’est actuellement la seule façon de se donner une chance de ne pas mourir définitivement.
La revivification a été réalisée sur des cellules, des petits organismes et des organes.
Risque de perte de soi : Si on sauve le connectome, on peut restaurer la conscience.
Table-ronde #20 :
“Education”
Dans un monde en plein bouleversement, un enseignement est nécessaire pour permettre la compréhension des changements de paradigmes que le transhumanisme implique. Ces enseignements doivent véhiculer des utopies ou de nouveaux récits d’un optimisme pratique. Les périodes d’apprentissage doivent se mêler toute la vie à celles de l’activité économique et des loisirs. Enfin, les méthodes d’apprentissages doivent tenir compte de ce que nous découvrons sur le cerveau humain et cesser d’être axées principalement sur la performance et la compétition.
Table-ronde #21 :
“AI & Existential risks”
Pour Pierre Collet, le risque majeur existentiel est celui d’une intelligence artificiellle nous rendant incapables de discerner le vrai du faux.
Les transhumanistes sont parmi les individus les plus conscients des risques qui pourraient mettre fin à notre existence. Aujourd’hui est le plus beau jour de l’histoire de l’humanité, mais c’est aussi le plus dangereux.
Le futur le moins dangereux, c’est celui que nous contribuons à produire.
CONCLUSIONS GÉNÉRALES :
- La dimension « philosophique » a été plus mise en avant et discutée que les dimensions techniques et opérationnelles. Il serait utile de mieux équilibrer.
- Un répertoire des techniques transhumanistes et leur hiérarchisation en termes de priorité et de valeur serait utile. Une réflexion sur les stratégies d’appropriation en fonction des contextes culturels est également à mener.
- Certaines tendances critiques vis à vis de l’idée de progrès et de la technologie peuvent conduire à des gaspillages et des aberrations écologiques.
- Nous sommes un groupe très diversifié et informé
- Nous sommes presque tous d’accord pour dire que nous devrions utiliser davantage de technologies pour améliorer la vie de toutes les personnes qui le souhaitent.
- Nous sommes presque tous d’accord pour dire qu’améliorer la vie signifie, entre autres, une vie plus longue, plus heureuse et plus saine pour tous ceux qui le souhaitent.
- Nous sommes presque tous d’accord pour dire que plus d’égalité pour les personnes d’origines, d’âges, de pensées, … différents.
- Nous sommes presque tous d’accord pour dire que nous devrions partager plus de données, plus de science, plus d’éducation.
- Nous sommes presque tous d’accord pour dire qu’un tel avenir n’est ni sûr, ni improbable.
- Nous sommes presque tous d’accord pour dire que parler et enseigner tout cela est important, mais qu’il est encore plus important d’essayer de le rendre possible.