Vieillissement : la grenouille, la cigale et la fourmi

Regardons le problème du vieillissement de manière plus rationnelle, dès le début de l’âge adulte, au lieu de nous agiter fébrilement et inefficacement quand il est trop tard.

Publié le 26 juin 2020, par dans « transhumanisme »

En 1979, Gregory Bateson, dans son livre écologiste La Nature et la Pensée, se sert d’une légende urbaine, celle de la grenouille ébouillantée, pour expliquer notre inertie face aux changements environnementaux.

Dans cette fable, une grenouille placée directement dans de l’eau trop chaude s’échappe d’un bond, alors qu’elle ne fait rien si la température augmente lentement – ce qui conduit à sa mort.

La fable a été cuisinée à toutes les sauces pour critiquer toutes sortes d’inerties coupables.

Pour nous longévitistes, qui pensons que le vieillissement doit être combattu et que mourir de vieillesse est inacceptable, on pourrait l’adapter ainsi : comme nous vieillissons lentement, nous ne remarquons les changements de notre état de santé qu’au moment où il est trop tard. Nous mourrons ainsi à petit feu, tués par la vieillesse qui ne nous concernait pas directement pendant la plus grande partie de notre vie. Nous n’investissons pas dans la recherche fondamentale parce que la “température n’est pas assez élevée” pour nous-mêmes, et quand elle le devient, nous sommes fatigués, usés, résignés. Combien de biologistes ne s’intéressent-ils au vieillissement que lorsqu’ils se sentent faiblir ?

Interrogeons-nous : nous habituons-nous progressivement à des changements qui nous paraîtraient inadmissibles s’ils survenaient d’un coup ? Si à 25 ans, nous perdions brutalement notre mémoire, notre audition et 50% de notre capacité pulmonaire, nous indignerions-nous ? Probablement ! Comme l’être humain se juge par rapport à ses semblables, il considère sa santé non pas par rapport à l’être humain moyen, mais à l’être humain moyen de sa génération.
Comme Arthur Rimbaud l’écrivait, avant d’ajouter dans un sursaut : “Puis quoi… aller mes vingt ans, si les autres vont vingt ans… Non ! non ! à présent je me révolte contre la mort !”

Mais voilà l’intéressant : en réalité, la fable de la grenouille ébouillantée se base sur un mythe, une rumeur. En 2002, un zoologue américain, Victor Hutchison, a tenté l’expérience. La grenouille, contrairement à ce que raconte la fable, tente de s’échapper dès que la température passe un certain seuil. Si on ne l’en empêche pas, elle le fait avec succès. En revanche, placée directement dans de l’eau brûlante, elle mourrait sur le coup. C’est donc strictement l’inverse !

Faisons comme les vraies grenouilles, pas celles de la fable : sortons de cette ornière dès que nous le pouvons : car les maladies du vieillissement nous foudroient et il est trop tard, plongés dedans, pour agir.

Quand nous tombons malades, nous nous débattons pour revenir à la normale. A 80 ans, nous dépensons encore des milliers d’euros pour une opération de la cataracte, une greffe de rein ou des compléments alimentaires et cosmétiques. 

Regardons le problème d’un point de vue plus rationnel, dès le début de l’âge adulte, au lieu de nous agiter fébrilement et inefficacement quand il est trop tard. Sur ce point, soyons moins cigales et davantage fourmis… mais c’est d’une autre fable qu’il s’agit !

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Porte-parole de l'AFT