Mise au point : Non, ce n'est pas "la fin de l'immortalité"

Suite à une récente étude, la presse s'emballe : nous pourrions ne jamais dépasser 125 ans ! Mais qu'en est-il réellement ?

Publié le 9 octobre 2016, par dans « Immortalité ?transhumanisme »

Une récente étude du journal Nature a fait couler beaucoup d’encre. Selon la presse, elle indiquerait qu’il existe une limite indépassable à l’espérance de vie humaine, ce qui anéantirait tout espoir de vivre plusieurs siècles.

On voit ainsi fleurir des titres comme :

Le terme « immortalité » est ambigu, et nous évitons généralement de l’utiliser (voir cette page). Cependant, ce qu’affirment ces articles, c’est qu’aucun humain ne pourra atteindre 1000, 300 ou même 200 ans.

Or, l’étude citée par Nature (qui est tout à fait rigoureuse et légitime) ne fait que confirmer un fait bien connu des longévitistes : il existe une sorte de « plafond de verre » de l’espérance de vie humaine aux alentours de 120 ans. De fait, le record de 122 ans, détenu par Jeanne Calment, n’a toujours pas été battu. Il s’agit d’une étude purement démographique, et non d’une étude biomédicale.

La presse affirme donc que, sous prétexte que la durée de vie maximale n’a pas augmenté depuis Jeanne Calment, elle ne pourra jamais dépasser ce seuil. C’est une affirmation totalement gratuite. Ce serait comme si, dans les siècles passés, on avait fait une étude tout à fait sérieuse montant l’augmentation des cas de rage, et que la presse en avait conclu que le vaccin contre la rage n’existe pas ! Ne mélangeons pas tout.

 

Alors, qu’en est-il ?

Jusqu’à présent, l’espérance de vie moyenne a énormément augmenté grâce aux progrès de l’hygiène et de la médecine. Cependant, ce n’est que depuis très récemment que l’on cherche à lutter contre le vieillissement en tant que tel. En effet, si nous pouvons difficilement dépasser 120 ans, c’est notamment parce que nos cellules cessent peu à peu de se régénérer avec l’âge. Chez de nombreuses plantes et quelques animaux, les cellules peuvent se régénérer indéfiniment. Ce n’est pas le cas chez l’humain : à partir d’un certain âge, on assiste à un phénomène de « suicide cellulaire ».

L’étude du vieillissement cellulaire est un domaine de recherche à part entière. Jean-Marc Lemaître, directeur d’une équipe de recherche dans ce domaine, déclare :

« Un consensus entre les laboratoires qui travaillent sur le vieillissement est apparu sur certaines données particulières du vieillissement, qui indiquent que probablement, toutes les pathologies qui sont liées à l’âge pourraient avoir un dénominateur commun. […] Lorsqu’on arrive sélectivement à supprimer les cellules sénescentes de souris, non seulement on retarde toutes les pathologies liées à l’âge, mais on augmente la longévité de ces souris de 30%. »

(source)

Il y a de nombreux domaines à explorer. La recherche médicale progresse dans les domaines des thérapies génétiques, des nanotechnologies, de la compréhension des maladies neurodégénératives… Une fois que le mécanisme de vieillissement sera mieux compris, on pourra chercher des moyens de le ralentir, de le stopper, voire même de l’inverser (comme nous le faisons déjà pour des souris).

L’étude de Nature ne fait que constater qu’aucun humain ne dépasse 125 ans à l’heure actuelle. Mais, au vu de ce nous avons dit plus haut, il n’y a aucun raison d’affirmer que l’on ne pourra jamais dépasser ces 125 ans. Sinon peut-être le désir de faire un titre d’article sensationnaliste.

Bien entendu, rien ne garantit que la compréhension du vieillissement, puis la lutte contre ce dernier, sera simple ou rapide. Mais, plus nous consacrerons des moyens, à la recherche contre le vieillissement, plus nous aurons des chances de permettre une vie en bonne santé beaucoup plus longue aux femmes et aux hommes qui le souhaitent.

 

Soit dit en passant…

L’auteur de l’article de Numérama, pour une raison qui nous échappe, semble jubiler à l’annonce de cette fausse nouvelle, se réjouissant de voir les longévitistes ainsi remis à leur place. Nous aimerions comprendre ce qui motive cette animosité.

Selon lui, les longévitistes « omettent de nombreuses réalités morales et psychiques ». Peut-être considère t-il, à l’instar de nombreuses personnes, qu’il est « bon », « juste », « moral » et « naturel » de mourir (de préférence avant 125 ans) ? Si l’on devait voir notre condition mortelle comme une prise d’otage de l’humanité entière, force est de constater que parmi les otages, le syndrome de Stockholm est très répandu !

A ceux qui sont angoissés par la perspective d’une vie plus longue, rappelons que mourir est un droit fondamental, que nous défendons au même titre que vivre plus longtemps en bonne santé. Qu’ils se rassurent donc  !

 

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Porte-parole et vice-président de l'Association Française Transhumaniste. Pour accéder à ma page perso (articles, chaîne YouTube, livre...), ou pour me contacter par e-mail, cliquez ici.