Objections #4 : Transhumanisme et crise de sens
Cette partie du livre (Partie 4) liste les objections qui sont faites au transhumanisme, et tente d'y répondre. Dans cet article : les craintes d'ennui, de perte de sens, de déshumanisation...
Publié le 1 août 2017, par dans « Homme augmenté • Immortalité ? • Risques • transhumanisme »
Cet article fait partie d’un livre sur le transhumanisme. Pour en savoir plus, cliquez ici.
Ne va-t-on pas s’ennuyer si on vit beaucoup plus longtemps ? Ou si on ne travaille plus (avec l’automatisation) ?
Cette question a déjà été traitée dans le chapitre « Une vie plus longue », à partir de « Mais pourquoi voudrait-on vivre plus longtemps, même en pleine forme et en pleine santé ? ».
Voir aussi : « L’absurde peur du temps libre »
Sans la mort, la vie a-t-elle encore un sens ? La beauté de la vie ne réside-t-elle pas dans sa brièveté ?
Là encore, voir la deuxième partie du chapitre « Une vie plus longue », avec notamment l’exemple de l’enfant.
Apprendre, créer, découvrir, voyager, aimer… toutes ces choses, nous les faisons par envie, et non par angoisse de notre trépas futur. Pour des personnes démotivées ou d’humeur morose, se souvenir que la vie est brève peut certes fournir l’électrochoc nécessaire pour entreprendre l’une de ces activités. Mais une personne curieuse et épanouie ne se pose pas ce genre de questions : quand bien même elle vivrait sans limitation de durée, elle ne resterait pas pour autant assise sur une chaise sans rien faire !
Voir aussi : « Est-il désirable de vivre 1000 ans ? Une réponse à Jean-Michel Besnier »
Sans contraintes physiques et biologiques, la vie a-t-elle encore un sens ?
En quelques siècles, nous avons supprimé énormément de contraintes. Nous avons réduit les distances grâce aux transports, et rendu le partage de l’information quasi-gratuit et quasi-instantané grâce à internet.
Pour autant, cela a-t-il rendu nos vies plus ennuyeuses ? Non : cela les a rendu plus complexes. En élargissant nos possibilités, de nouveaux défis apparaissent. Il y a quelques siècles, on ne soupçonnait même pas l’existence de la mécanique quantique ou des galaxies lointaines.
Étendre nos possibilités grâce à la technologie ne simplifie pas le monde jusqu’à lui ôter tout intérêt. Au contraire : cela le complexifie sans cesse, et le rend sans cesse plus intéressant et fascinant.
Rappelons également l’existence des jeux : jeux de construction, jeux de compétition, jeux vidéos… Ces jeux consistent à créer des contraintes arbitraires, afin de produire des sentiments tels que l’amusement, l’exaltation ou la passion. Et les possibilités de jeux ouvertes par le transhumanisme sont vertigineuses.
« Évoluer pour évoluer », à quoi bon ?
Les motivations philosophiques derrière le transhumanisme sont expliquées dans le chapitre « Pourquoi le transhumanisme ? ».
Le transhumanisme va nous déshumaniser, nous faire perdre notre identité
Quand on dit que le transhumanisme nous « déshumanise », il s’agit en fait d’un quiproquo sémantique.
Si l’on entend « humain » au sens strict (avoir deux bras, deux jambes, vivre moins d’un siècle…), le transhumanisme pourrait effectivement nous « déshumaniser », dans le sens où il nous ferait évoluer vers quelque chose de différent de l’homo sapiens actuel.
Mais si l’on entend « humain » au sens philosophique du terme, le transhumanisme vise justement à nous rendre plus humains : plus intelligents, plus sensibles, plus créatifs, plus empathiques… et jouissant d’une longévité accrue pour réaliser notre potentiel.
L’important est d’être humain au sens philosophique, pas au sens littéral !
Article plus détaillé : « Rester humain… ou devenir plus humain ? »
Le transhumanisme ne va-t-il pas nous faire perdre en liberté ?
Le transhumanisme en général, non, car il vise à étendre le champ de nos possibilités. Seule une certaine application des technologies futures pourrait réduire nos libertés, et créer une société de l’« hyper-surveillance » (comme celle dépeinte dans le film Minority Report). Il faut encourager les applications émancipatrices, et rejeter les applications liberticides.
En particulier, il faut être vigilant lorsque nous sommes tentés de troquer de la liberté contre de la sécurité (notamment en ces temps de menace terroriste). Quand bien même cela semblerait pertinent aujourd’hui, il faut garder à l’esprit ce que cela pourrait donner à l’avenir, avec des leaders autoritaires tentés d’utiliser les technologies du contrôle les plus sophistiquées.
Une des façons de réduire ce risque est d’encourager un transhumanisme « open source » (comme évoqué dans la Partie 3). Cela permettrait de garantir la transparence des outils technologiques, mais aussi de distribuer équitablement la « puissance technologique », afin qu’elle ne soit pas réservée à une élite dominatrice. C’est notamment cela qui a motivé l’initiative OpenAI d’Elon Musk.
Article plus détaillé : « Pour un transhumanisme open source »
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